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L’apport avant cession

Actualité du comité Transmission – mai 2023

Transmission d’entreprises

L’APPORT AVANT CESSION

Cette newsletter est centrée sur la fiscalité des cessions d’entreprises, que ce soit fonds de commerce ou sociétés commerciales. Compte tenu de l’ampleur du sujet et de l’importance que revêtent les questions fiscales dans l’accompagnement de nos clients, il a été décidé de vous proposer plusieurs articles, à lire dans cette newsletter et les prochaines.

Nous aborderons successivement les questions fiscales relatives aux points suivants :
• Cession d’un fonds de commerce à l’IR,
• Cession d’un fonds de commerce si le cédant est soumis à l’IS,
• Fiscalité d’une cession de titres,
• Les outils d’organisation patrimoniales : l’apport avant cession, la donation avant cession et le pacte Dutreil.

Dans cette newsletter, sont présentés les incidences d’une cession de fonds de commerce à l’impôt sur le revenu, ainsi que l’apport avant cession de titres.

 

L’APPORT AVANT CESSION :

L’apport avant cession constitue un process destiné à limiter la fiscalité sur la cession des titres d’une société. Il est particulièrement intéressant pour les entrepreneurs qui ne souhaitent pas cesser toute activité professionnelle ou, au moins, n’ont pas comme désir premier de récupérer immédiatement le fruit de la cession de leur entreprise.

L’apport avant cession est régi par l’article 150-0 B ter du Code Général des Impôts.

Modalités :

Le propriétaire de la société à céder apporte ses titres à une société holding dont il détient le contrôle, c’est-à-dire la majorité des droits de vote (en tenant compte le cas échéant du conjoint, des collatéraux, descendants ou ascendants), ou l’exercice dans les faits du pouvoir de décision.

L’apport peut se faire en pleine propriété ou par le biais de droits sociaux démembrés.

Le sursis d’imposition est acquis pour toutes les opérations sans soulte. Si celle-ci dépasse 10% de la valeur nominale des titres, l’opération est soumise à fiscalité immédiate.

Que faire de la plus-value ?

La plus-value mise en report doit tout de même être suivie et mentionnée dans la déclaration 2074-I, accompagnée d’une attestation de la société bénéficiaire des apports, reconnaissant l’existence de la plus-value dont l’imposition fait l’objet d’un report.

Le jour de la cession des titres par la société holding :

Si la cession intervient postérieurement à la période de 3 ans suivant l’apport des titres, seule la plus-value de cession sera fiscalisée : impôt sur 12% de la plus-value.

Si la cession intervient dans le délai de 3 ans suivant la réalisation de l’apport de titres, outre la plus-value de cession (cf. paragraphe précédent), il conviendra d’acquitter la fiscalité sur la plus-value d’apport, sauf investissement de 60% du produit de la cession dans les deux années. Dans la pratique, la holding vendeuse des titres choisira de réinvestir 60% et si elle ne satisfait pas à cette condition, l’impôt sur la plus-value d’apport sera également exigible.

Notons également que si les titres reçus lors de l’apport par le dirigeant, sont cédés, le sursis d’imposition lors de l’apport est remis en question et la fiscalité est due :

  • la fiscalité grevant la cession des titres reçus, d’une part et
  • l’impôt sur la plus-value placée initialement en report d’imposition, d’autre part.

Le réinvestissement doit être réalisé dans un délai de deux ans à compter de la cession. Dans le cadre d’une mission d’expertise comptable, il nous appartient d’être vigilant sur cette durée, afin de prévenir et d’avertir notre client lorsque le délai avance et qu’aucune acquisition n’est prévue.

De même, nous devons expliquer à nos clients que l’investissement doit se faire dans un une activité économique réelle, et non un accroissement du patrimoine de l’associé. A titre d’exemple, investir la moitié du prix de la vente dans un bien immobilier, voire une SCI, donnerait lieu à remise en cause de l’avantage fiscal.

L’administration risque-t-elle de remettre en cause le montage d’apport avant cession ?

Hormis le non-respect d’une des conditions (notion de contrôle de la holding, cession des titres apportés avant 3 ans, non réinvestissement dans le délai de 2 ans), comme pour toute opération ayant une conséquence fiscale significative pour l’entrepreneur ou son entreprise, nous devons apprécier la motivation et les conditions financières de l’opération. A titre d’exemple, un apport avec soulte pourrait le cas échéant être remis en cause.

Limites de l’apport avant cession :

Si la fiscalité est réduite dans cette opération les contraintes imposées par l’administration, notamment le réinvestissement ou le délai de trois années ne conviennent pas à toutes les opérations de cessions d’entreprise.

En qualité d’experts-comptables, nous devons être vigilants sur l’adéquation entre le projet de notre client et les contraintes que cela suppose. Ce type de montage est efficace pour un entrepreneur souhaitant réinvestir dans d’autres projets professionnels, en ne sortant pas la trésorerie d’une « bulle » à l’impôt sur les sociétés d’une part, et en permettant de réinvestir la totalité du produit de la vente, d’autre part.

En revanche, un entrepreneur souhaitant récupérer rapidement la trésorerie issue de la vente ne choisira pas ce montage pour organiser la cession des titres de son entreprise.

Une contrainte pour le cédant que peut apprécier l’expert-comptable

Afin de bénéficier pleinement de la mesure fiscale visant à réduire considérablement le poids de la fiscalité sur la plus-value de cession, le dirigeant-cédant doit anticiper et procéder à un apport des titres qu’il souhait céder à minima 3 années avant la date de cession envisagée.

Dans le cadre de notre accompagnement en qualité d’expert-comptable, il peut être intéressant d’inciter nos clients qui, dans un moyen terme, seraient amenés à céder leur entreprise, à faire un apport de leurs titres à une société holding à constituer pour l’occasion.

Au-delà de la question fiscale relative à la sortie des titres, la période intercalaire entre l’apport et cette cession peut devenir un temps d’organisation fiscale et sociale pour le dirigeant. L’expert-comptable peut conseiller à son client une organisation optimisée de sa propre rémunération, d’éventuels contrat d’intéressement, de prise en charge de Cesu préfinancés, de cotisations complémentaires de retraite, etc.) au sein de la holding. Ainsi, la cession serait facilitée, d’une part et, les années précédentes seraient sources d’opportunités fiscales et sociales, d’autre part.

L’anticipation nécessaire pour mettre en œuvre « un apport avant cession » est donc source d’opportunités pour nos clients et d’expression de notre force de conseil pour notre profession !

 

Signature du rédacteur et qualité EC, membre du Comité Transmission du CROEC Paris IDF

 

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