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Suivi budgétaire du CSE et outils informatiques

Actualité du comité CSE – décembre 2022

Comité/commission
CSE

Chaque comité, en fonction de ses moyens, définit ses priorités d’action visant à promouvoir auprès des salariés des activités sociales et culturelles et mettre en œuvre les attributions que lui a confié le législateur au regard de ses prérogatives économiques et professionnelles.

L’élaboration d’un suivi budgétaire, au-delà de répondre à une obligation légale, s’avère indispensable pour s’assurer que les décisions votées, notamment en termes de prestations proposées aux salariés, soient respectées et pour réaliser des arbitrages en cas de dérive budgétaire. Les élus disposent alors d’une pluralité d’outils informatiques pour les aider dans ce suivi.

 

Une démarche impérative

Sans clause d’aménagement spécifique prévue par le règlement intérieur du comité, les élus doivent voter en séance plénière chaque dépense que réalise le comité. Sans ce vote, le trésorier ou le secrétaire ne peuvent engager les fonds de l’instance. Aussi, la constitution d’un budget prévisionnel présente l’avantage de pouvoir faire valider la majorité des dépenses du comité en un seul vote.

Réaliser un budget prévisionnel ne présente pas seulement cet avantage : il permet aussi au comité de suivre ses opérations au cours de l’exercice comptable, selon le découpage budgétaire prévu, et de rendre compte à l’issue de l’exercice des opérations réalisées.

Pour les comités percevant plus de 153 000 € de ressources annuelles, la conception d’un budget prévisionnel n’est pas seulement une démarche indispensable, c’est une obligation légale en vertu de l’article D2315-38 du Code du travail qui indique que le rapport annuel d’activité et de gestion du comité doit présenter « les éléments d’analyse portant sur les écarts entre le budget prévisionnel et le budget réalisé« .

Un fin suivi budgétaire permet aussi de facilement rendre compte de ses opérations à l’URSSAF qui peut décider d’assouplir son contrôle si sa lecture des actions menées par le comité est aisée.

 

Concrètement, comment s’y prendre ?

Tant que le CSE reste conforme à son objet, il est libre dans le choix des actions qu’il entreprend et peut proposer une multitude de prestations à ses ouvrants-droits dans le cadre de ses activités sociales et culturelles.

L’élaboration d’un budget prévisionnel s’avère impérative pour s’assurer que le CSE a les moyens de ses ambitions ou s’avère au contraire trop modeste.

Le suivi budgétaire du CSE se déroule en plusieurs étapes indispensables à sa réussite :

1- Définir les prestations que l’on souhaite mettre en œuvre

Le CSE est constitué de membres élus titulaires qui n’ont pas tous les mêmes idées, ni ne poursuivent les mêmes objectifs en termes d’actions à mener ou du poids à donner à telle prestation vis-à-vis des autres.

Sur chaque thématique, le comité doit s’assurer qu’une majorité d’élus y sera favorable, c’est pourquoi la définition d’une politique sociale claire communiquée par chacune des listes qui se présente aux élections participe grandement à cette opération de cadrage.

Selon la taille du CSE, cette analyse est réalisée par le bureau des élus directement ou par une ou plusieurs commissions (commission « ASC », commission « voyages », etc.) qui lui remontent le fruit de leurs travaux.

2- Quantifier les dépenses et recettes prévisionnelles

Une fois les prestations et actions à mener identifiées, il convient de définir le coût potentiel de chacune d’elles sur le budget du CSE.

En matière de prestations d’œuvres sociales, le niveau de dépense à prévoir dépend largement de nombre d’ouvrants-droits concernés. Certaines prestations seront offertes à l’ensemble du personnel, d’autres seront proposées en contrepartie d’une participation et à certaines conditions.

Sur chaque prestation, il convient donc d’identifier le plus justement possible le nombre de bénéficiaires prévus.

Le comité pourra s’appuyer sur ses propres statistiques si l’offre a déjà été antérieurement proposée ou, dans le cas contraire, essayer d’en obtenir des tiers (prestataires, expert-comptable, autres CSE etc.).

Une fois cette analyse réalisée, le CSE sera en mesure de demander un ou plusieurs devis aux prestataires susceptibles de pouvoir proposer les offres recherchées.

 

3- Organiser son plan comptable analytique

À partir de cette étape, il convient de pouvoir classer chacune des prestations que le CSE est susceptible de proposer par thématique et par famille d’activité. Le comité pourra alors comptabiliser ses dépenses et ses recettes selon cette organisation.

Sauf à ce que le CSE soit en train de se constituer, le comité est généralement doté d’un plan comptable analytique. Il faudra alors s’assurer que le découpage est toujours cohérent ou, dans le cas contraire, l’ajuster.

 

4- Monter son budget prévisionnel et arbitrer

Cette étape est généralement réalisée par le trésorier du CSE.

Le budget prévisionnel se présente en liste selon le même découpage que le plan analytique du comité. Sous chaque thématique analytique figure en détail les prestations et actions envisagées. Pour chacune, sont identifiés les montants des dépenses et recettes prévisionnelles. Dans un premier temps toutefois, le montant de la participation des ouvrants-droit sur chaque prestation n’est pas renseigné, car il s’agira ici d’une des variables d’ajustement possible du budget.

Le montant prévisionnel de la subvention de fonctionnement et de la contribution de l’employeur aux activités sociales et culturelles dépend intrinsèquement de la masse salariale prévisionnelle de l’entreprise. Le trésorier pourra demander au président du CSE que lui soit communiquée cette information essentielle pour établir le budget.

Le trésorier devra aussi prendre en compte le montant du patrimoine du comité en fin d’exercice par budget (ses « fonds propres »), afin de définir s’il convient de viser un résultat proche de l’équilibre (s’il estime que les fonds propres du comité sont adaptés) ou excédentaire (patrimoine jugé trop faible pour mener ses actions sans risque, il faut alors reconstituer des réserves supplémentaires via un excédent budgétaire) ou déficitaires (les réserves sont jugées inutilement trop élevées, un résultat déficitaire va alors permettre de prélever une partie de ces réserves).

Lorsque l’ensemble des éléments cités sont renseignés, le trésorier est alors en mesure de réaliser des arbitrages pour atteindre le résultat prévisionnel souhaité.

Comme nous l’indiquions, c’est à cette étape que l’on peut définir le montant éventuel de participation que le CSE demandera aux ayants-droits. Cette étape est souvent insuffisamment travaillée, alors qu’elle constitue justement une des solutions pour équilibrer le budget de comité. Trop de CSE abandonnent certaines de leurs prestations, alors qu’il suffirait de faire participer davantage les salariés pour doter les comités de ressources supplémentaires. Attention toutefois, les tarifs proposés sont susceptibles de jouer sur le niveau de consommation des prestations et donc des dépenses à prévoir. Là encore, le comité devra s’appuyer sur des données statistiques pour statuer. Par ailleurs, il conviendra d’arbitrer le montant des participations des salariés en fonction du poids que le CSE estime nécessaire d’affecter à chaque thématique, au prisme du nombre de bénéficiaires visés et à la diversité des offres qu’il souhaite proposer.

Nous conseillons aussi de prévoir d’autres variables d’ajustement en complément de la politique tarifaire. Le comité peut mettre en place des plafonds individuels dont le principe sera de stopper ou réduire la contribution du comité par individu à partir du moment où celui-ci dépassera un montant cumulé d’aide. Le comité peut aussi prévoir de limiter le nombre de places possibles pour certaines prestations (voyage par exemple). Il veillera alors à mettre en place une méthode d’attribution « tournante » des prestations visant à ce qu’une personne qui n’a pas encore bénéficié d’une prestation limitée en nombre de bénéficiaires soit privilégiée vis-à-vis de ceux qui ont déjà pu bénéficier de prestations similaires.

Le comité pourra aussi prévoir de faire varier ses tarifs en fonction de critères sociaux non discriminatoires.

Si un critère d’ancienneté est prévu pour bénéficier d’une prestation, il conviendra de s’assurer que celui-ci n’évince pas de facto une catégorie de salariés (CDD par exemple) ou les stagiaires de l’entreprise.

 

5- Voter le budget

Il n’est pas rare qu’il faille faire plusieurs échanges entre les membres du CSE (bureau des élus, commissions le cas échant et élus titulaires) avant de trouver un consensus sur le budget prévisionnel.

Ce dernier sera alors proposé, puis voté en séance plénière à la majorité des membres élus présents.

À partir de cette étape, et en conformité avec ses process définis dans son règlement intérieur, le comité sera en mesure de mener les actions de mise en place des prestations et de solliciter les prestataires.

 

6- Le suivi des opérations

Le comité doit ensuite comptabiliser au fur et à mesure, durant toute l’année, ses dépenses et ses recettes selon son plan analytique et vérifier régulièrement que les hypothèses sur lesquelles le budget prévisionnel a été bâti se confirment, que ce soit en termes d’informations comptables, tels que les montants payés aux prestataires et le nombre de participants par catégorie, le prix moyen par bénéficiaire etc.

Dans le cas contraire, si les variations sont significatives, un budget rectificatif devra être établi et voté.

Nous conseillons au CSE de se constituer un tableau de bord qui centralise le suivi opérationnel des activités du CSE ; une attention particulière devant être menée sur les prestations susceptibles d’engendrer un dérapage budgétaire important.

 

7- L’approbation des comptes en fin d’exercice

Les comptes du comité doivent être approuvés dans les 6 mois de la clôture de l’exercice comptable. Un rapport d’activité et de gestion doit alors être présenté.

Pour les comités de plus de 153 000€ de ressources, un comparatif entre le budget prévisionnel et le budget réalisé doit être présenté et les écarts expliqués.

Bien entendu, au-delà de cette contrainte légale, l’analyse des écarts permet de mieux appréhender les hypothèses de travail pour établir le prochain budget prévisionnel.

 

Les outils informatiques à disposition des élus pour les aider à suivre leurs budgets

L’utilisation de tableurs est indispensable pour monter des hypothèses budgétaires. Les feuilles de calcul s’actualisent automatiquement à chaque changement de variable, facilitant ainsi la constitution de différents scénarios.

Dans les CSE ayant très peu d’opérations à suivre, le tableur est généralement le seul logiciel utilisé. Sont alors traités sur cet outil, aussi bien la constitution du budget prévisionnel, le suivi comptable et opérationnel de l’activité et la présentation des résultats de fin d’exercice.

La comptabilité peut également être traitée sur un logiciel comptable classique. C’est généralement le cas lorsque le nombre d’opérations à suivre devient important et que le trésorier ou le personnel du CSE disposent de compétences comptables ou délègue la comptabilisation des opérations à leur expert-comptable.

Il existe aussi sur le marché de nombreuses solutions qui s’adressent spécifiquement aux CSE. Ces solutions permettent aux personnes non comptables de formation de pouvoir facilement suivre leurs opérations dans un environnement adapté aux particularités des comités (séparation des budget, suivi analytique etc.). Très souvent, ce type de logiciel, dit « ERP », génère automatiquement les écritures comptables sous-jacentes aux opérations de suivi rentrées dans l’outil.

Bien entendu, toutes les solutions ne se valent pas. Nous trouvons sur le marché de nombreux logiciels qui, d’un point de vue comptable, sont à proscrire ou dont le suivi des opérations ne permet pas de pouvoir facilement justifier de ses activités en cas de contrôle URSSAF. C’est l’un des gros inconvénients des solutions actuelles qui cumulent très souvent, sans grande qualité et sur une même interface, le suivi des opérations (inscriptions des ayants-droits aux activités notamment), la comptabilité, la gestion du site internet du comité et l’accès à des plateformes de vente en ligne.

Quel que soit l’outil comptable utilisé, ce dernier doit pouvoir alimenter une comptabilité analytique pour les enjeux de suivi budgétaire que nous venons de voir. L’avantage des solutions « ERP« , est de pourvoir disposer, dans un même outil, d’un univers de gestion qui permet de consigner et gérer l’activité de CSE vis-à-vis des ouvrants droits (suivi des prestations vendues, paramétrage des tarifs, quantités disponibles, des conditions d’accès, des éventuels plafonds etc.) et d’un univers comptable permettant de suivre l’activité et la comparer aux données prévisionnelles.

Attention, chaque « ERP » a ses spécificités qui nécessitent d’être parfaitement maitrisées pour ne pas créer involontairement de distorsions entre les univers de gestion, censés refléter « la réalité »,  et les données comptables. Selon le logiciel, la correction par exemple d’une saisie ne s’opère pas de la même façon : ainsi, selon les logiciels, les corrections s’opèrent via les univers de gestion, alors que d’autres le prévoient via l’univers comptable. Ces enjeux sont souvent mal appréhendés par les élus ; ce qui perturbe grandement le suivi des opérations.

 

Conclusion

La mise en œuvre d’un véritable suivi budgétaire est indispensable pour s’assurer que les décisions financières votées soient respectées.

La multitude de solutions informatiques proposées à ce jour aux CSE pour suivre et piloter leurs activités ne se valent pas toutes.

Face à cette situation, nous ne pouvons que conseiller aux élus de se faire accompagner de leur expert-comptable pour les aider dans le choix de leur logiciel.

 

Article de Guillaume Sauvage, expert-comptable et membre du comité CSE de l’Ordre des experts-comptables Paris Île-de-France

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