Défaillance d’entreprises : les experts-comptables montent au créneau !
En novembre dernier, l’Ordre lançait un appel à volontariat pour faire face à l’augmentation du nombre de TPE/PME en difficulté. De nombreux experts-comptables ont répondu à cet appel mais en quoi consiste ces entretiens et pourquoi la mobilisation d’experts-comptables est nécessaire ?
Le nombre d’entreprises en difficulté en très forte augmentation
En 2023, 57 729 entreprises sont entrées en procédure de défaillances en France soit 36% de plus qu’en 2022 dont près de 12 000 en Île-de-France. Liquidation, redressement judiciaire ou dépôt de bilan, le rythme s’est accéléré au dernier trimestre avec près de 16 800 entreprises touchées. 243 000 emplois directs ont ainsi été menacés. Le phénomène concerne à 92% des petites entreprises tandis que la part de PME est en hausse de 80%. Ces défaillances s’expliquent par la fin des aides de l’État et le mouvement de “rattrapage” post crise sanitaire mais aussi par la conjoncture économique. *
Face à l’ampleur de la situation, les 6 centre d’information sur la prévention des difficultés des entreprises (CIP) franciliens sont plus mobilisés que jamais. En 2023, 76 entretiens avaient été recensés dans le CIP du 75 avec une demande en forte croissance. Si bien, que le CIP a décidé de doubler le nombre de sessions mensuelles en ce début d’année 2024.
Un dispositif destiné à rassurer les chefs d’entreprise
Le CIP organise des permanences pour recevoir en entretien confidentiel et gratuit des chefs d’entreprise en difficultés financières. Durant 30 minutes, ils ont l’opportunité d’échanger avec des experts volontaires (avocats, experts-comptables et ancien juge du tribunal de commerce).
Le profil des participants est varié. Certains se sont renseignés en amont et sont au fait de leur situation. Ils n’ont besoin que de confirmation quant aux procédures à engager. D’autres paraissent dépassés. Ils rencontrent des difficultés avec les notions basiques de comptabilité et ne sont plus en contact avec leur expert-comptable car plus en capacité de rémunérer les services de conseil.
L’objectif de ces entretiens est donc d’abord de rassurer les chefs d’entreprise, parfois de dédramatiser certaines situations, puis de conseiller les démarches à entreprendre. Les dirigeants concernés seront redirigés vers le Tribunal de Commerce pour qu’une procédure adaptée puisse être mise en place.
De l’expertise comptable, mais pas que…
Bras droit des chefs d’entreprise et déjà confrontés à ces difficultés, les experts-comptables sont bien placés pour effectuer cette mission d’utilité publique.
Etant donné la durée des rendez-vous, il est essentiel de saisir rapidement la situation dans laquelle se trouve le participant afin de pouvoir l’orienter vers les bons interlocuteurs et lui recommander les bonnes mesures de prévention.
Parmi les questions utiles à se poser, nous comptons notamment : dans quel état sont les liquidités des entreprises ? Quel est le niveau d’endettement ? Sont-elles déjà en situation de cessation de paiement ? Si oui, depuis combien de temps ?
Un lien de confiance doit être établi afin que les participants se sentent à l’aise et libres de parler. Pédagogie, bienveillance et écoute sont de rigueur.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, la comptabilité n’est pas le seul sujet à aborder, bien au contraire. L’aspect psychologique est également très important.
Jérôme Casteuble, membre du CIP, explique : “Au début, c’est marquant car on rentre beaucoup dans la psychologie. Les dirigeants ne sont pas préparés à rencontrer ce type de situation et le vivent mal ».
“Souvent, on retrouve 5 minutes de comptabilité, 5 minutes de droit et beaucoup de psychologie lors de ces entretiens.” nous confie Alexandra Blanch, administratrice judiciaire associée.
Une entreprise en difficulté cela donne facilement une perception négative de sa situation, pourtant, de nombreux outils existent pour accompagner les dirigeants qui y font face (procédures préventives, procédures de sauvegarde, procédures de redressement judiciaire). Les mentalités doivent évoluer et ces entretiens peuvent y contribuer.
